De l'utilité d'avoir un placard confortable
Des fois, les gens sont cons. Enfin non, des fois, les gens vous soûlent. Encore que, pour être plus exacte, des fois les gens cons vous soûlent. Que vous ayez un seuil de tolérance assez élevé ou plutôt bas, où que se situe le curseur, il est atteignable, partant du postulat que vous ne vivez pas dans une grotte et que vous n'êtes pas Mère Teresa.
Fatalement un jour pas fait comme un autre, les gens vous soûleront. Pas pour toute la vie, non, juste ce jour là. Des fois, même les pas-cons peuvent vous agacer, parce que vous n'êtes pas à même de temporiser et de faire avec. Mais il faut quand même avouer que quand les pas-cons commencent à vous pomper l'air, c'est très probablement parce que des cons ont bien préparé le terrain.
Comme vous n'êtes pas totalement décérébré malgré votre mental de poulpe, vous savez que si vous prenez un peu de recul, votre intolérance aiguë et passagère à la connerie est plutôt due à tout un tas d'autres choses en plus d'une éventuelle et vraiment pas-de-bolesque accumulation de votre entourage, et que juste aujourd'hui, vous n'avez absolument pas envie de faire d'effort pour comprendre, sourire, écouter, répondre poliment et faire des courbettes. Ça arrive. C'est comme ça.
Alors que pouvez-vous faire quand vous êtes absolument réfractaire à tout ce qui sort de votre espace (à la Dirty Dancing) ? A part évidemment la solution fort tentante de l'hibernation au fond d'un placard enroulé dans une couette à manger des tWix en bouquinant à la lampe de poche ? (Ne me regardez pas comme ça, je sais, il paraît que ça se soigne bien maintenant).
En tout premier lieu et de manière quasi réflexatoire (c'est joli non ?), vous pouvez recréer un placard imaginaire autour de vous. (Je vous jure que mon cerveau n'a pas fondu un plomb). Vous vous fermez au monde, par la musique, par un livre, par un parcours de course à pied, vous vous installez dans votre bulle et vous laissez passer l'orage intérieur qui s'annonce et qui désormais ne pourra blesser personne d'autre que vous, seul dans votre bulle.
Vous pouvez aussi, dans un tout autre style, être exécrable avec chacun, envoyer paître tout le monde et ne répondre à personne. Ce n'est plus vous que vous mettez dans une bulle, mais le reste du monde que vous entassez dans un bubble-boatpeople, une arche de Noé qui tentera de survivre à votre ire légendaire.
La dernière solution, comme toujours pour les 3ème solutions, est un peu plus tirée par les cheveux, mais est souvent la plus efficace. En tout cas pour ceux qui n'aiment pas être dans cet état là trop longtemps. Quand vous sentez que vous ne supportez plus rien, que chaque phrase prononcée vous donne envie de tuer à mains nues et que le moindre haussement de sourcil sera le battement d'aile d'un papillon menant au tsunami, recréez du lien avec le monde au lieu de vous écarter de lui. Il y a forcément une ou deux personnes dont la compagnie vous est encore plaisante, avec qui vous pouvez imaginer 1000 façons d'enterrer un cadavre ou refaire le casting des 7 nains en version locale.
Laissez quelqu'un ouvrir la porte du placard, vous allumer la lumière et acceptez sa présence, même silencieuse. Cet Autre devient une passerelle entre votre colère ou votre tristesse et le reste du monde qui n'a rien compris à ce qui se passait, et vous permet de vous réhabituer à l'humain doucement, à votre rythme et en tout quiétude. Laissez donc cet Autre vous apprivoiser de nouveau.
Quand l'envie de placard est enfin passée, quand vous n'êtes plus une mégère hystérique ou une froide machine à casser du con, quand vous êtes à nouveau bien en place dans votre monde, vous réalisez alors que vous avez énormément de chances d'avoir des gens qui vous acceptent même quand vous êtes comme ça, et vous balayez d'un revers de main les dernières traces de ronchonnage pour laisser beaucoup d'espace à la gratitude et l'énorme joie de constater que finalement, vous êtes plutôt bien entouré.
Sacrément bien même.